HOMO DETRITUS
Kinshasa, 2020
une série remarquable … des images devenues iconiques
Cette exceptionnelle galerie de portraits en pied réalisée en 2020 au Congo Kinshasa par Stephan Gladieu, est empreinte de la puissance narrative de ses précédentes séries, et imprégnée de son ADN chromatique, qui confère à chacune de ses images une véritable réalité augmentée aux confins de la spiritualité et d’une galaxie de supers héros parés pour quelques batailles intergalactiques.
De batailles il s’agit bien, mais c’est avant tout pour générer une prise de conscience sur l’accumulation inexorable des déchets qui dénaturent la planète, aussi bien nos océans que le continent africain ici.
Deuxième plus grand pays d’Afrique, la République Démocratique du Congo possède l’un des sous-sols les plus riches au monde en or, coltan, diamant, cobalt, pétrole…et reste pourtant le 8ième pays le plus pauvre de la planète.
La RDC est un scandale géologique.
« Ce qui est né de la terre retourne à la terre » disait Euripide… En RDC, nous avons corrompu le cercle vertueux en transformant une terre nourricière en poubelle.
Autre paradoxe : de ces déchets qui ensevelissent les bidonvilles de Kinshasa vient de naître un mouvement artistique qui emprunte beaucoup à la démarche de l’Arte Povera, mouvement contestataire de la société de consommation à la fin des années 60 en Italie.
Il crie son urgence de vivre et non plus de survivre dans les détritus et l’injustice du monde.
Téléphones portables, plastiques, bouchons, mousse synthétique, chambres à air, tissus, câbles électriques, seringues, cartons capsules, pièces détachées de voiture, canettes, tout est matière première – et pourtant déjà finales ! – à dénoncer le chaos dans lequel le Congo est maintenu.
Recouverts de masques intégraux confectionnés à partir de détritus, une génération d’artistes se lève et fédère dans un collectif qui a soif de revendications, une nécessité primaire et viscérale de créer et de dénoncer. Si le Congo a en partie perdu ses traditions animistes et mystiques, dissoutes sous la pression du catholicisme des anciens colons belges, ces jeunes artistes retournent à la source traditionnelle du masque africain. Un masque habité, porteur d’esprit, symbole d’un trop-plein.
Ce collectif c’est « Ndaku, la vie est belle », fondé il y a six ans par le plasticien Eddy Ekete. Il regroupe aujourd’hui près de 25 artistes presque tous formés à l’académie des Beaux-Arts de Kinshasa.
Peintres, chanteurs, plasticiens, musiciens, ils se sont unis pour dénoncer la tragédie de leur quotidien, les guerres qui en sont issues, l’exploitation des femmes et des hommes qui en découle et fermente la misère insondable qui les prive de toute dignité.
À l’origine, ces artistes avaient un point commun : ils ne disposaient d’aucune ressource, d’aucun soutien. Habitants des bidonvilles, ils ont naturellement trouvé dans les déchets une matière première foisonnante et gratuite. C’est Eddy qui va créer le premier masque, ouvrant la voie aux jeunes artistes qui l’entourent.
« Le collectif m’a accueilli pendant deux semaines pour réaliser ce projet artistique qui s’inscrit dans la continuité de mon travail. Je suis resté fidèle à mes partis pris photographiques en choisissant de réaliser les portraits dans les rues de Kinshasa, le décor et le personnage se répondant.
La rue est l’histoire commune de ces artistes. Leur collectif organise des performances de rue pour provoquer une prise de conscience des autorités et des habitants. Il était donc légitime de les replacer dans la réalité des ghettos de Kinshasa. »
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